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Assurance emprunteur ae

Scandale assuré

 

En matière d’assurance emprunteur, il y a une prime à la détermination. Fin juillet, une décision du Conseil d’État confirme le scandale financier que l’UFC-Que Choisir dénonce depuis 2007 : la non-redistribution aux assurés emprunteurs des « bénéfices techniques et financiers » colossaux des assurances entre 1994 et 2007.

Le Conseil d’État a, en cinq lignes, définitivement soldé cinq longues années d’arguties juridiques des assureurs au sujet de l’assurance emprunteur. En effet, pour s’opposer à la redistribution, prévue par la loi et réclamée dès 2007 par l’UFC-Que Choisir, des surprimes n’ayant pas servi à couvrir la réalisation des risques, les ­assureurs se prévalaient de deux arrêtés qui excluaient l’assurance emprunteur de cette redistribution. Les montants en jeu (16 milliards d’euros, si l’on cumule prêts immobiliers et crédits à la consommation) sont colossaux et le scandale d’autant plus grand que la participation aux assurés a été indûment reversée aux banques… Le Conseil d’État, saisi en 2007 pour avis sur la légalité de ces arrêtés, ne s’était pas ­prononcé en faveur d’un arrêté modificatif réintégrant l’assurance emprunteur dans le giron de la redistribution. Les banques et les assureurs pensaient alors que les milliards indûment versés aux banques avant cette date étaient définitivement ­protégés… C’était sans compter sur la ­détermination de l’UFC-Que Choisir qui, dans le cadre d’un contentieux avec les assureurs, a obligé le Conseil d’État à se prononcer. Et la décision que vient de rendre la plus haute juridiction administrative est catégorique : en matière de redistribution aux assurés, la loi de 1994 fixe un principe général aux entreprises d’assurance sur la vie, sans exception, et les arrêtés étaient donc illégaux ! Le fait d’avoir reversé ces bénéfices aux banques constituait bien, plus qu’un arrangement inadmissible, des marges arrière illégales ! Aujourd’hui, l’heure est donc venue de rendre aux assurés le trésor de guerre amassé entre 1994 et 2007. Mais c’est là que se profile, peut-être, un nouveau scandale… En effet, l’UFC-Que Choisir travaille aujourd’hui à la mise en place d’outils simples et efficaces devant permettre aux assurés victimes de réclamer leur possible participation. Mais, faute d’action de groupe permettant l’indemnisation de tous en un seul procès et compte tenu de la nécessité d’accéder à des pièces comptables non publiques, la tâche s’avère délicate… Le lobby financier ne va d’ailleurs pas manquer de s’activer pour freiner, voire empêcher, la redistribution, certains ­assureurs ayant déjà opposé un refus aux assurés emprunteurs qui se prévalaient de la décision du Conseil d’État. L’agence de notation Moody’s a, quant à elle, affirmé que cette décision constituait une menace pour les notes de crédit des banques et des assurances françaises, nouvelle que les assureurs risquent d’instrumentaliser auprès des pouvoirs publics… Cependant, en raison de l’illégalité des arrêtés gouvernementaux, il appartient au ministère de l’Économie, jusqu’à présent silencieux, de prendre ses responsabilités et de mettre en œuvre des mesures pour permettre à la collectivité des assurés emprunteurs de récupérer son dû. La solidité des banques et assurances françaises n’a pas à être assise sur la violation de la loi. Les parlementaires sont sur la même ligne, comme le prouve le flot de questions au ministre de l’Économie publié au Journal officiel sur ce sujet. Affaire à suivre. Seule certitude : avec les assurances, ­l’indemnisation est toujours problématique.

Alain Bazot
Président de l’UFC-Que Choisir

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