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DROITS DES USAGERS DANS LEUR RECOURS AU SYSTEME DE SANTE

ATELIER CONSO  UFC-Que Choisir Marseille 28 mars 2019 Maison de l’intergénération
DROITS DES USAGERS DANS LEUR RECOURS AU SYSTEME DE SANTE
Afin d’aborder un bref historique sur ce thème, déclinons l’évolution sémantique de ce que nous appelons ou appelions malade dans les siècles précédents. En effet, le malade, selon le terme latin est « celui qui se trouve en mauvais état » ou celui, selon un texte médical du 10e siècle, « qui souffre d’une quelconque altération de la santé ». La relation médicale alors est multiple et complexe. Les professionnels, qu’ils soient médecins, rebouteux, religieux, herboristes, ou charlatans, sont des « pourvoyeurs de services médicaux » apportant secours aux malades comme aux tiers aidants ou soignants laïcs. Au 20e siècle et jusque dans les années 70,  le malade est devenu  le patient, du mot latin « patiens », celui qui souffre, qui endure, en fait celui qui subit. Malgré l’émergence des premiers droits des patients, il n’était pas prévu à l’époque que ces patients puissent émettre un avis ou donner un consentement sur les soins qui leur étaient prodigués.
Dans les années 80 puis 90, différents événements ont conduit à l’émergence d’une nouvelle forme de relations entre les soignants et les soignés. L’épidémie du Sida, ce virus face auquel malades et soignants étaient aussi démunis, a conduit non sans difficultés à une nouvelle forme de relation de soins. La parole du malade ou patient a été progressivement plus et mieux considérée. On a commencé à s’éloigner du modèle paternaliste d’un médecin décidant pour le patient. Les scandales sanitaires successifs, ceux du sang contaminé, de l’amiante, de la maladie de Creutzfeld Jacob ont participé ensuite à ce mouvement de rééquilibrage de la relation soignants-soignés. Une montée en puissance des associations de patients s’est alors manifestée prenant ainsi part aux débats sur la qualité des soins et la sécurité des patients et plus largement sur l’organisation du système de santé.
Ce mouvement a abouti à la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Le patient devenait alors l’usager, étymologiquement celui qui a droit d’user de la chose. Il faudra attendre plusieurs années pour voir publier les décrets d’application concernant notamment l’agrément des associations représentant les usagers dans les instances hospitalières. Cette loi a pour vocation de ne plus traiter le malade en tant que bénéficiaire de soins uniquement mais bien comme une personne accompagnée et responsable, sur le plan non seulement médical mais également social et humain.
Force est néanmoins de constater que se posent encore aujourd’hui, dix-huit ans après, la question de l’effectivité de la mise en œuvre de cette loi, des atteintes régulières au principe même du texte.
Par souci de simplification,  déclinons les apports essentiels de ce texte dans une première partie avant d’aborder dans une seconde la mise en œuvre des recours dont dispose l’usager.

LES DROITS DES USAGERS DANS LEUR RECOURS AU SYSTEME DE SANTE
Ces droits sont ceux qui régissent les relations des usagers du système de soins avec les professionnels et les établissements de santé. Parfois préexistants, ces droits ont été consacrés par la loi Kouchner. Les droits des usagers relèvent d’une catégorie de droits que l’on dit subjectifs, c’est-à-dire reconnus par la loi à son titulaire dans son intérêt. Le choix de ce modèle traduit la volonté politique de reconnaître aux personnes malades des droits leur donnant le pouvoir d’exercer leurs choix. La loi du 4 mars 2002 comporte 126 articles et reconnaît à la fois des droits individuels et des droits collectifs aux patients et usagers du système de santé.
Certains professionnels de santé tentent d’imposer des devoirs en contrepartie de ces droits. C’est remettre en cause la légitimité de ces droits, les relativiser, voire les nier, c’est renoncer à prendre acte du déséquilibre fondamental entre la personne malade et ses interlocuteurs, déséquilibre qu’a voulu corriger le législateur. Il n’y a pas de conditions pour exercer ses droits, ils sont pleins et entiers. L’idée principale de la loi est de faire que « l’usager soit au cœur du système ». Ce vœu dépendra de nos propres capacités à connaître et à exercer les différents droits qui sont attachés aujourd’hui à l’usager.
Nous avons divisé empiriquement nos propos sur plusieurs points : l’information, le consentement et le respect à la vie privée et à la dignité.

1/- L’INFORMATION
Elle se décline dans l’information sur les soins, l’information sur les coûts et l’accès au dossier médical.
L’information sur les soins
 Le livret d’accueil L’article L112-2 du code de la Santé Publique prévoit la remise systématique d’un livret d’accueil pour tout patient hospitalisé – privé ou public – lors de son admission ou, le cas échéant, à l’un de ses proches. Il est également  obligatoirement remis en établissements sociaux ou médico-sociaux. Ce document, dont le contenu attendu a été révisé en 2008, doit comprendre toutes les informations dont peut avoir besoin l’usager lors de son séjour, notamment le nom des chefs de service, les horaires de visites, les règles de fonctionnement (formalités administratives, informations sur les coûts). Y figurent également les conditions d’accès aux informations de santé et les modalités d’expression d’une réclamation ou d’une plainte et notamment sont exposées les attributions et les conditions de saisine de la commission des relations avec les usagers (coordonnées de la personne responsable…) Une synthèse de la charte de la personne hospitalisée est obligatoirement annexée, accompagnée d’un engagement de lutte contre la douleur et du programme de lutte contre les maladies nosocomiales. Par ailleurs, vous êtes censé y trouver, depuis l’arrêté du 15 avril 2008, des fiches standards visant à développer des points particuliers (droit accès au dossier médical, droit d’expression de ses directives anticipées, droit de désignation de la personne de confiance).

 Droit d’être informé sur son état de santé En préambule, une remarque sur le secret médical. Il n’est pas opposable au patient lui-même, seule sa volonté manifestée et inscrite dans son dossier médical d’être tenu dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic peut exonérer les professionnels de leur devoir d’informer. C’est un changement important car, jusqu’alors, les médecins pouvaient « apprécier en conscience » ce qu’ils devaient dire ou non à l’intéressé. Ils ne peuvent désormais le faire que pour respecter sa volonté.
Ce droit d’être informé concerne tout d’abord l’état de santé et ce qui est proposé (investigations, soins) afin de permettre d’obtenir de l’usager son « consentement libre et éclairé ». Ce droit est renforcé dans quelques cas comme la sécurité sanitaire et le dommage lié aux soins. Ce droit concerne toute personne prise en charge par tout professionnel de santé (dans son domaine de compétence) ou établissement de santé et si nécessaire en concertation entre eux. Ce droit d’information s’exerce soit au cours d’un entretien individuel préalable aux soins, soit postérieurement aux soins en cas d’événement indésirable ou d’apparition de risques nouveaux et si nécessaire en concertation entre eux. Les professionnels sont tenus de mettre en place les conditions nécessaires d’un véritable échange, information orale qui peut être complétée par des documents écrits. L’usager peut se faire accompagner par la personne de confiance qu’il aura le cas échéant désignée.
– L’information doit être complète et porter sur tout ce qui est entrepris ou proposé au patient (investigations, examens, traitements, orientation, actions de prévention) et sur ce qui permet d’apprécier le rapport bénéfice/risque (effets indésirables, risques fréquents ou graves « normalement prévisibles», alternatives éventuelles, conséquences en cas de refus). – La jurisprudence a instauré une obligation de moyens renforcés, c’est-à-dire que le médecin est tenu d’apporter les meilleures réponses possibles compte tenu de l’état de la recherche et donc proposer à tout usager les dernières molécules sorties (hépatite C, VIH, par exemple). – Le  principe d’application de ce droit est la co-construction du projet de soins de l’usager avec le professionnel de santé.

De plus, la loi du 4 mars 2002 a entériné une jurisprudence importante qui a renversé la charge de la preuve. Désormais, la charge de la preuve de l’information incombe au professionnel, par tout moyen. Ce n’est plus à l’usager de « prouver » qu’il n’a pas été suffisamment informé.
 Droit d’être informé sur les coûts Toute personne prise en charge par tout professionnel ou établissement de santé doit être informée sur les coûts des prestations, sur les conditions de prise en charge par les régimes d’assurance maladie et de dispense d’avance de frais et ce préalablement aux soins ou à sa sortie d’hospitalisation. Cette information se manifeste par un affichage dans les lieux d’accueil, plus par un devis écrit au-delà d’un certain montant et porte aussi bien sur les activités de prévention, de diagnostic que de soins.

 Accès au dossier médical Ce thème reste l’un des plus conflictuels en raison des différents obstacles que les usagers rencontrent pour obtenir des informations sur ces dossiers au sein des établissements. Le droit d’accès « direct » signifie que la personne peut consulter directement les documents, sans la médiation (intermédiaire) d’un médecin ou d’un autre tiers. En pratique, chaque personne conserve le libre choix d’accès : – soit directement par consultation sur place (au sein de l’établissement), soit par demande d’envoi de copie des documents, – soit indirectement par l’intermédiaire d’un médecin ou de toute autre personne qu’elle mandate expressément et à laquelle sont envoyées les informations souhaitées.
Cette information vise toutes les informations détenues par le professionnel ou l’établissement. Il s’agit des informations qui ont contribué à l’élaboration du diagnostic ou du traitement et/ou ont fait l’objet d’échanges écrits entre les professionnels. Une liste non limitative inclut sans ambiguïté tous les comptes rendus, les résultats d’examen, les observations et feuilles de surveillance médicale et paramédicale, ainsi que les correspondances entre professionnels de santé. S’y ajoutent également tout écrit, image, enregistrement… et ce indépendamment de leur caractère manuscrit ou non, validés (médicalement) ou non. Ce droit dépasse donc l’accès au dossier puisqu’il prévoit la communication de toutes les informations de santé détenues par l’établissement qu’elles soient ou non intégrées matériellement dans le dossier médical. Ce principe ne souffre pas de dérogation à l’exception d’informations mettant en cause des tiers, soit pour les notes personnelles des professionnels, soit pour les ayants droit en opposition de son vivant par la personne décédée.
Ce droit est exercé par les titulaires de l’autorité parentale pour les mineurs, par les tuteurs ou curateurs pour les personnes handicapées. Il s’exerce dans un délai de 20 ans suivant la dernière consultation ou hospitalisation et dans un délai de 10 ans à compter du décès pour les ayants droit. Le dossier s’obtient par un courrier en recommandé avec accusé de réception et copie de la pièce d’identité dans un délai de 8 jours (pour les infos de moins de 5 ans) et de 2 mois (pour les infos plus de 5 ans).
Depuis la mise en œuvre de la réglementation européenne sur la protection des données personnelles, vous devez être informé de manière formelle du traitement informatisé des données médicales vous concernant (droit d’opposition,  de rectification, droit à la confidentialité…..).

2/- CONSENTEMENT
Le droit de participer aux décisions concernant sa santé découle expressément du droit à l’information que nous venons d’aborder. Il concerne le consentement aux soins et le libre choix du praticien et de l’établissement.  Le consentement aux soins L’information sur son état de santé vise à faire du patient un acteur de sa propre santé. La loi de 2002 renforce cette visée en passant de la notion de « consentement » à celle de « décision partagée », « toute personne prenant avec le professionnel de santé, et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé ».

Par ailleurs le Code civil dispose qu’« il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique pour la personne et que son consentement doit être recueilli…».
A cette obligation s’ajoute la nécessité de respecter un délai de réflexion. Le patient doit avoir le temps d’évaluer les informations qui lui ont été données. Il n’est pas prévu de formalisme particulier au consentement. Aucun écrit n’est donc nécessaire, sauf exception (recherche biologique). Le consentement doit être libre, éclairé et exprès, ce qui suppose une information préalable simple, intelligible et loyale.
Si le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté du fait de son état de conscience (coma, endormissement…) alors qu’un geste médical s’impose, 2 cas sont à distinguer : – hors situation d’urgence, le professionnel se doit de consulter les directives anticipées qu’aurait rédigées le patient, ainsi que la personne de confiance, à défaut la famille ou les proches, – en cas d’urgence, la jurisprudence laisse au médecin la responsabilité de la décision.

Ce consentement concerne toute personne prise en charge, y compris les mineurs et les majeurs sous tutelle, le tuteur d’un majeur protégé, les titulaires de l’autorité parentale, la personne de confiance, la famille ou les proches si la personne concernée est hors d’état de s’exprimer. Il est préalable aux soins et rétractable à tout moment.
Ce droit admet donc son corollaire, celui de refuser de consentir aux soins. Le refus non équivoque du patient ne peut pas être transgressé, la volonté du patient fonde le rapport de confiance avec le médecin. Ce n’est qu’en cas d’urgence vitale que l’obligation du professionnel de respecter la volonté du patient s’opposera à celle d’assistance à personne en danger. La jurisprudence reconnaît au médecin le droit d’agir pour la sauvegarde immédiate de la vie.
 Le droit à l’accès aux soins La liberté du choix du praticien et de l’établissement est le principe reconnu par le préambule de la Constitution d’octobre 1946. La Charte du patient hospitalisé (1994) et la Charte de la personne hospitalisée (2006) rappellent le principe d’un égal accès aux soins pour tous, en particulier pour les personnes les plus démunies.
Toute personne prise en charge par tout professionnel de santé ou établissement a le choix de son établissement de santé et le choix de son professionnel de santé en libéral ou au sein d’un établissement de santé. Ce droit a des limites en cas d’urgence ou lorsque ce choix perturbe l’organisation du service, contrevient aux exigences sanitaires de continuité des soins. D’autres éléments peuvent être de nature à limiter l’accès aux soins, notamment les difficultés engendrées par la démographie médicale et la désertification qui en découle sur le territoire.
Dans les faits, et au-delà des aspects théoriques, il convient d’être vigilant sur l’affectivité de ce droit car de nombreuses enquêtes ont démontré que de nombreux bénéficiaires de la CMU complémentaire et de l’aide médicale d’état subissaient des refus de soins de la part de certains professionnels de santé. Ces pratiques condamnables peuvent faire l’objet de recours (HALDE, Conseil de l’ordre…).

3/- LA PROTECTION JURIDIQUE DE L’INTIMITE
Ce droit se décline sous deux angles, celui du respect de l’intimité et de la vie privée et celui du secret professionnel.
 Le respect de l’intimité et de la vie privée L’hôpital ainsi que l’ensemble des lieux de santé ne sont pas des lieux à part où les contraintes du service prévaudraient sur les droits au respect à l’intimité et à la vie privée.
Certains textes et jurisprudences le rappellent : – L’art. 9 du Code civil précise que « chacun a droit au respect de sa vie privée », – Tout en reprenant ce principe, la Charte de la personne hospitalisée insiste sur le fait que « le respect de l’intimité du patient doit être préservé, lors des soins, des toilettes, des consultations et des visites médicales… », – La loi de 2002 reprend et réaffirme ces principes et précise que « la personne malade a droit au respect de sa dignité » et que « toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations le concernant ».
Ainsi donc, une personne hospitalisée peut demander que sa présence ne soit pas divulguée. La chambre du patient est également un lieu de vie privé. Ceci a été consacré par une jurisprudence de la Cour d’Appel de Paris, dit arrêt Chantal Nobel, qui affirme que quiconque désire accéder à la chambre d’un malade doit en avoir reçu l’autorisation préalable de la part de l’occupant. De plus, la confidentialité du courrier, des communications  téléphoniques et des entretiens avec des visiteurs doit être respectée. Les patients peuvent également demander au personnel de service d’interdire l’accès à leur chambre à des personnes qu’ils désignent.
 Le secret professionnel Le fondement du secret professionnel est prévu par l’article 226-13 du Code pénal qui prévoit que la « révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état, soit par profession, soit en fonction d’une fonction ou d’une mission temporaire est punie… ». Le secret médical est une composante du secret professionnel et a été repris par le Code de la santé publique et le Code de déontologie des médecins. Ce secret professionnel est d’ordre public et s’impose à tous, sauf dérogations prévues par la loi comme par exemple la sécurité sanitaire, la dénonciation de sévices sur mineurs, la préservation de l’intérêt du patient…
La loi de 2002 a repris ces droits et les a renforcés en les formulant sous l’angle des droits des patients et pas seulement des devoirs des professionnels. Elle les a élargis non seulement « à la connaissance des professionnels de santé, de tout membre du personnel de ces établissements ou organismes et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s’impose à tout professionnel de santé ainsi qu’à tous les professionnels intervenant dans le système de santé ». Des dérogations existent mais limitées.
Entre professionnels de santé (hors équipe de soins), tout information sur la santé d’une personne ne peut intervenir qu’après que cette dernière en a été dûment informée et qu’elle ne s’y est pas opposée. De plus, cet échange doit avoir pour finalité soit la continuation de soins, soit la détermination de meilleurs soins.
Atelier Conso – santé  Mars 2019 UFC-Que Choisir 6/12
Ainsi, contrairement aux idées reçues, le secret professionnel concerne bien les professionnels de santé entre eux. Au sein d’une équipe de santé, les informations confiées à un membre de l’équipe sont censées être communiquées à l’ensemble de l’équipe, c’est-à-dire intervenant directement dans la prise en charge de la personne malade. Ce n’est en aucun cas la situation d’un médecin du travail ou d’un médecin consultant d’assurances…
Le secret professionnel ne fait pas obstacle à l’information des proches sauf si le patient s’y est opposé. Le seul auquel l’on ne peut opposer le secret professionnel est le patient lui-même. Toute personne doit pouvoir avoir la réponse qu’elle souhaite à ses questions sur son état de santé, sauf si elle a manifesté par écrit sa volonté d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic.
La violation du secret médical peut entraîner trois modes de sanctions, pénale, civile, disciplinaire (ordre ou ministère de la santé), sanction du droit du travail. De plus, le code pénal a prévu que les professionnels, astreints ou non au secret professionnel, qui tenteraient d’obtenir ou obtiendraient des données de santé personnelles sans en être les destinataires légitimes seraient sanctionnés des mêmes peines que la violation du secret professionnel.
LA VIOLATION DES DROITS ET LES PROCEDURES A METTRE EN ŒUVRE DANS LE CAS D UN ACCIDENT MEDICAL
Il existe plusieurs modes de règlement des litiges. La plupart des violations aux droits des usagers ne donneront pas lieu à la mise en œuvre de la responsabilité administrative ou judiciaire de l’établissement. La violation de l’intimité et de la vie privée (absence d’une séparation lors d’une toilette dans une chambre), l’absence d’intervention pour calmer la douleur, une récrimination sur la qualité des repas…, engageront d’abord l’organisation de l’établissement auquel seront adressés les examens des plaintes et réclamations. La commission des relations avec les usagers pourra intervenir simultanément ou à la suite de celle du responsable d’établissement.
 Les examens des plaintes et réclamations Tout usager d’un établissement de santé peut exprimer oralement ses griefs auprès des responsables des services de l’établissement (infirmier coordonnateur, cadre de santé, directeur de pôle ou d’établissement). En cas d’impossibilité ou si les explications reçues ne  satisfont pas, l’usager peut alors soit adresser une plainte ou réclamation écrite au représentant légal de l’établissement, soit voir sa plainte ou réclamation consignée par écrit, aux mêmes fins. Une copie du document lui est alors délivrée. L’ensemble des plaintes est transmis au représentant légal de l’établissement. Ce dernier doit y répondre dans les meilleurs délais et avise le plaignant de la possibilité de saisir un médiateur ou l’informe avoir procédé à cette saisine.
Si la plainte met exclusivement en cause l’organisation des soins et le fonctionnement médical du service, c’est le médecin médiateur qui est compétent. Le médiateur non-médecin a à connaître les plaintes et réclamations étrangères à ces questions. Si une plainte ou réclamation relève de divers aspects, médicaux ou non, ils sont simultanément saisis. Le médiateur saisi par le représentant légal où par l’auteur de la plainte ou de la réclamation rencontre ce dernier dans les huit jours suivant la saisine. Si le patient est hospitalisé, il le rencontre avant sa sortie de l’établissement. Dans les huit jours suivant cette rencontre, le médiateur adresse le compte rendu au président de la commission qui le transmet sans délai aux autres membres de la commission, ainsi qu’au plaignant. Au vu du dossier, la commission formule des recommandations pour apporter une solution au litige ou pour que l’intéressé soit informé des voies de conciliation ou de recours dont il dispose. Elle peut également émettre un avis motivé en faveur du classement du dossier. Dans le délai de huit jours suivant la séance, le représentant légal de l’établissement répond à l’auteur de la plainte et joint à son courrier l’avis de la commission.
 Le représentant des usagers et les commissions des relations avec les usagers La Commission des usagers doit veiller au respect des droits des usagers et faciliter leurs démarches. Il y siège des membres de l’établissement (directeur, médiateur médecin et nonmédecin), mais aussi des représentants d’usagers, membres d’associations agréées en santé. C’est le cas de UFC-Que Choisir, qui est reconnue comme association de santé et qui m’a permis d’être RU de plusieurs établissements de santé.
La lecture des plaintes, réclamations et éloges est une source inépuisable d’informations sur l’organisation, le fonctionnement, la qualité de la prise en charge dans les différents services. Il s’agit d’un indicateur efficace pour connaître le climat social de l’établissement. Le RU dispose d’un certain nombre de droits définis par le Code de la santé publique
PROCEDURE SUITE ACCIDENT MEDICAL – INFECTION NOSOCOMIALE OU AFFECTION IATROGENE
 Qu’est-ce qu’un accident médical ? Un accident médical est un événement ayant entraîné un dommage anormal au regard de l’évolution prévisible de l’état de santé du patient au cours d’un acte de soins, de prévention ou de diagnostic. L’acte peut s’être produit dans n’importe quel lieu de soins, un établissement de santé, public ou privé, un cabinet professionnel de santé exerçant en libéral, un laboratoire, une pharmacie, un cabinet thérapeutique. Un accident médical peut être consécutif à une faute ou à un aléa. Un accident médical peut être constitué également en cas d’infections nosocomiales ou d’affections iatrogènes. L’infection nosocomiale est une infection contractée au cours d’un acte de soins dans les 30 jours suivant l’intervention chirurgicale ou dans l’année suivant la pose d’une prothèse. L’affection iatrogène est due à un médicament ou à un traitement. Il peut s’agir d’effets indésirables, de surdosage, d’interactions entre plusieurs médicaments.
 Quelles victimes ? – la victime directe est celle qui a intérêt à agir car c’est elle qui a subi un dommage suite à l’accident médical, – la victime indirecte est celle qui a un lien particulier et personnel avec la victime directe et qui à ce titre peut avoir subi des préjudices individuels. Il peut s’agir du conjoint, des parents ou enfants, – les ayants droit sont les successeurs légaux de la victime décédée et qui se substituent à elle pour valoir ses droits.
 Que sont les préjudices ? Ce sont les conséquences dommageables de l’accident ou de l’infection qui peuvent faire l’objet d’une indemnisation. – préjudices patrimoniaux   : perte de revenus professionnels, dépenses engagées en matière de santé ou d’aide à domicile, – préjudices physiques     : incapacité temporaire ou permanente, partielle ou totale, préjudice esthétique, douleurs, préjudice sexuel, – préjudices moraux ou psychologiques,  – préjudices sociaux  …
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 Quel est le rôle de l’expert, de l’expertise ? Quel que soit le recours engagé par la victime, une expertise est diligentée. Menée par un professionnel de santé ayant des compétences en réparation du dommage corporel, l’expertise est le point névralgique de la procédure en responsabilité médicale, surtout en matière d’indemnisation des préjudices. Je ne développerai pas outre mesure les points de l’expertise si ce n’est que le plaignant à tout intérêt à se faire accompagner soit par un médecin-conseil soit par un médecin-recours.
 Ce qu’il faut savoir – Le dossier médical est l’élément clef. Préalablement à toute démarche, il convient d’en demander copie. – La prescription de l’action en responsabilité médicale a été uniformisée. Que l’acte médical se soit produit dans un cabinet de ville, dans un centre de soins, privé ou public, la victime a un délai de 10 ans pour intenter une action à compter de la consolidation de son état de santé. – La consolidation signifie que malgré les soins prodigués, l’état de la victime peut être considéré comme permanent, et si des soins sont encore nécessaires, ils ne le sont que pour éviter une aggravation qui est toujours possible.
LES VOIES DE RECOURS
Les voies de recours à privilégier face à un accident médical divergent en fonction de l’objectif poursuivi par la victime : sanction du professionnel et/ou réparation des préjudices subis. Il faut noter que ces recours ne sont pas alternatifs : il est tout à fait possible à la victime d’engager ces procédures concomitamment ou l’une après l’autre.
LES RECOURS NON INDEMNITAIRES 1/ En cas de dysfonctionnement collectif ou institutionnel qui s’est déroulé au sein de l’établissement, plusieurs actions peuvent être menées en fonction de la nature juridique du lieu dans lequel s’est produit l’accident. – Pour un établissement de santé public ou privé, il convient de saisir la Commission des usagers CDU (déjà indiqué précédemment), – Au sein d’un établissement médico-social, une personne qualifiée, extérieure à l’établissement et inscrite sur une liste départementale peut être saisie par la personne accueillie pour l’aider à faire valoir ses droits. Le Conseil de la vie sociale permet d’associer les usagers au fonctionnement de l’établissement.
2/ En cas de manquement déontologique d’un professionnel de santé (non-respect du droit à l’information, refus de soins), il convient de saisir le Conseil de l’ordre de la profession qui, après une conciliation, peut prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre du professionnel de santé fautif.
3/ Par ailleurs, l’autorité de tutelle de l’ensemble du système de santé sur le plan local est l’Agence régionale de la santé. A ce titre, elle doit être informée de toutes difficultés rencontrées par les usagers dans leur parcours de soins.
4/ Les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation (que l’on détaillera ultérieurement) peuvent être saisies par toute personne de contestations relatives au respect des droits des patients et des usagers du système de santé. Il s’agira d’un usager victime de la violation d’un de ses droits (respect à la dignité, à la vie privée, etc.) ou d’une association ou d’une personne estimant que les droits des usagers n’ont pas été respectés (associations agréées, cdu…). La CRCI siège alors en formation de conciliation.
5/ Enfin, si le but recherché par la victime est la sanction pénale du responsable de son dommage, il convient alors soit de déposer plainte à la gendarmerie ou au commissariat de police, soit d’écrire un courrier au procureur de la république du tribunal compétent. Il faut que les éléments constitutifs d’une infraction pénale soient réunis.
LES RECOURS INDEMNITAIRES La loi de 2002 a procédé à un aménagement novateur des procédures d’indemnisation, s’appuyant sur la mise en place d’une indemnisation amiable des litiges par la création d’organismes nouveaux (commissions régionales de conciliation et d’indemnisation, office national d’indemnisation des accidents médicaux…). Le principe est celui de la réparation intégrale des préjudices subis par la victime.
1/ La transaction amiable La transaction amiable est la démarche que la victime peut entreprendre directement auprès du professionnel ou de l’établissement de santé mis en cause dans l’accident médical. Tout professionnel ou tout établissement de santé contracte obligatoirement une assurance pour garantir les risques encourus par son activité.
Il s’agit de demander par courrier LRAR à la personne que l’on pense responsable du dommage (directeur dans un établissement de santé) d’actionner son assurance responsabilité professionnelle en vue de la mise en œuvre d’une expertise amiable qui évaluera les fautes éventuelles et les préjudices qui en découlent. Cette expertise est menée par le médecin-conseil de l’assurance. Après expertise, l’assurance pourra proposer à la victime une indemnisation. L’accompagnement de la victime par un médecin conseil est important. Si aucun accord n’est trouvé entre les parties, la victime pourra alors poursuivre les responsables de son dommage devant les juridictions compétentes. Si l’assurance estime que le dommage n’engage pas la responsabilité de l’établissement ou de la personne qu’elle assure, elle ne proposera aucune offre d’indemnisation et la victime pourra engager, si elle le souhaite, la responsabilité de l’auteur de l’accident devant la Commission régionale de conciliation et d’indemnisation ou les juridictions de droit commun.
A noter que si l’acte a eu lieu dans un établissement de soins public, cette action est un préalable obligatoire à la saisine ultérieure du tribunal administratif et déclenche les délais pour agir. Deux mois après l’envoi de la demande d’indemnisation, le silence gardé par l’administration vaut refus. La victime a ensuite deux mois à compter de la décision de refus explicite ou implicite pour saisir le tribunal compétent. Si les délais sont dépassés, la décision de l’établissement sera réputée définitive et la victime de l’accident ne pourra pas être indemnisée, sauf s’il s’agit d’un aléa thérapeutique.
Si la victime accepte la proposition de l’assurance, la procédure se conclut par une transaction amiable dans laquelle la victime s’engage à ne pas saisir les tribunaux pour obtenir réparation des mêmes préjudices. La victime dispose d’un délai de 15 jours pour dénoncer la transaction qu’elle aurait signée avec le professionnel, l’établissement ou l’assurance.
2/ Les commissions de conciliation et d’indemnisation Dans chaque Région, il existe une Commission régionale de conciliation et d’indemnisation. Elle siège alors en formation de règlement amiable des accidents médicaux. La saisine de la commission n’est pas un préalable obligatoire à une procédure contentieuse. Outre son président qui est un magistrat, chaque commission est pluraliste et est constituée de représentants des usagers, de professionnels de santé, de représentants d’établissement de santé publics et privés… Cette procédure amiable d’indemnisation n’est réservée qu’aux préjudices graves, comme par exemple un déficit fonctionnel permanent supérieur à 24 %.
Pour mémoire, je rappelle l’existence de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, qui est en charge des dommages liés à un accident médical, d’une infection nosocomiale ou affection iatrogène au titre de la solidarité nationale. Ainsi les victimes de vaccinations obligatoires, des victimes transfusées contaminées par le VIH, de l’hormone de croissance… Il existe également la Commission nationale des accidents médicaux chargée de la formation des experts en matière de responsabilité médicale et qui est chargée d’établir des recommandations sur la conduite des expertises.
3/ Les voies juridictionnelles de réparation d’un préjudice corporel La victime peut également faire le choix d’engager la responsabilité des professionnels ou établissements de santé devant les juridictions de droit commun – Si l’établissement est un établissement public, il faudra saisir le tribunal administratif. – Si l’établissement est un établissement privé, il faudra saisir le tribunal d’instance (inférieur à 10 000 euros) ou le tribunal de grande instance (préjudice supérieur à 10 000 euros). Il en va de même si le professionnel de santé exerce en libéral.
La juridiction compétente est celle dans lequel l’établissement a son siège social, où il est situé administrativement et où le professionnel exerce son activité. En matière pénale, c’est la juridiction du lieu où est survenu l’accident qui est compétente. Il y a des règles propres à chaque juridiction, 10 ans à compter de la consolidation du dommage, mais la prescription de l’action publique au pénal est de 3 ans pour les délits et de 10 ans pour les crimes. Nous avons vu précédemment les règles de saisine des TA.
Dans ces procédures, il revient à la victime de solliciter une expertise, dont les frais sont à sa charge, par un expert indépendant, inscrit auprès des tribunaux. A la suite de l’expertise, il appartiendra à la victime d’engager une procédure sur le fond. Ces procédures sont souvent longues et onéreuses. Il convient, si on en dispose, de recourir à sa protection juridique. La présence d’un avocat est obligatoire la plupart du temps et fortement conseillée lorsqu’elle ne l’est pas. Il en est de même pour le médecin conseil.

CONCLUSION
La reconnaissance des droits des usagers, leur renforcement, leur mise en œuvre tout au long du parcours de santé constituent un enjeu essentiel pour notre société et représentent, dans un système de santé en profonde mutation, un formidable levier au service de l’émancipation et de l’autonomisation de chacun de ses acteurs. Les droits des usagers du système de santé c’est la
Atelier Conso – santé  Mars 2019 UFC-Que Choisir 11/12
protection de la santé comme un droit fondamental de l’être humain, l’équité dans la répartition et l’accessibilité des biens et services de santé (au sein de la collectivité et sur un territoire géographique), la démocratie en santé et les relations, sur un plan individuel et collectif, entre l’usager et le professionnel de santé.
La législation concernant les droits des patients ou usagers est en constante évolution : ces 20 dernières années, on est passé d’un système paternaliste (le praticien prend les décisions à la place du patient), à une approche centrée sur le patient (le professionnel intègre dans son analyse clinique la façon dont le patient compose avec sa maladie) à, enfin, le concept de partenariat de soins entre le professionnel et le patient. En effet, aujourd’hui, tout au long du parcours de santé et du temps de la prise en charge, la relation entre l’usager et le(s) professionnel(s) doit s’inscrire dans un cadre partenarial qui implique : consentement aux soins, accès au dossier médical, secret professionnel et partage des informations médicales entre professionnels de santé, accès aux soins…
La loi Kouchner de 2002 a mis en place les bases de la démocratie sanitaire, en reconnaissant le rôle des usagers du système de santé, avec le concept de « patient-usager » et en consacrant le droit des patients à accéder à leur dossier médical et participer activement aux décisions thérapeutiques les concernant. Cependant, 17 ans après, certaines dispositions de cette loi ne sont pas toujours respectées en pratique et les patients connaissent souvent mal leurs droits. Une enquête des services de l’Etat révèle en effet qu’en 2018, près de 70 % des Français ne connaissent pas vraiment leurs droits individuels. Ce qu’il faut retenir, c’est que la relation au système de santé ne doit ni être défiante ni reposer sur une confiance aveugle. Le législateur a voulu remettre le patient-usager au cœur du dispositif en lui octroyant des droits. Les connaître et se défendre lorsqu’ils sont bafoués est un enjeu de démocratie.

BB – atelier MIG  – 03/2019

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