Eau prix et facture
L’eau du robinet est claire mais les factures peuvent être opaques
Eau claire, mais facture trouble ? C’est un peu vrai dans certaines communes…
Tout d’abord, l’eau du robinet est de bonne qualité pour 97,5 % des Français. Ceux-là ont tout intérêt à la boire, car elle coûte 130 fois moins cher que l’eau en bouteille.
Mais plus d’un million de Français reçoivent une eau contaminée en pesticides, nitrates et sélénium. En effet, dans les régions où l’agriculture est la plus intensive (Nord, Pas-de-Calais, Marne, Aube, Aisne, Yonne, Seine-et-Marne, Eure-et-Loir, Loiret, entre autres), l’utilisation des pesticides n’a pas diminué en 10 ans.
Un demi-million d’autres, dans 1500 communes, reçoivent une eau contaminée par la radioactivité ou l’aluminium, ou bien encore de qualité bactériologique insuffisante.
Ce sont les communes qui assurent le service de l’eau. Aussi bien son captage, son traitement et sa distribution qu’ensuite la collecte des eaux usées, leur traitement et leur retour au milieu naturel.
Elles peuvent gérer elles-mêmes en ‘’régies’’ ou déléguer les services à des entreprises privées, tout en demeurant responsables. Actuellement, la production d’eau du robinet est assurée à 70 % par des entreprises privées ; l’assainissement collectif étant, quant à lui, assuré à 56 % par le secteur privé.
Les trois mastodontes des services de l’eau sont, dans l’ordre alphabétique, SAUR, SUEZ et VEOLIA.
Une facture d’eau comprend trois parties : eau du robinet ; assainissement collectif, si l’abonné a le tout-à-l’égout ; enfin, taxes et redevances diverses et variées… Il y a bien un arrêté du 10/7/1996 pour les encadrer, mais parfois l’imagination est au pouvoir, sans que la transparence ne soit au rendez-vous ! Les régies n’étant pas forcément partisanes de la clarté et de la conformité à l’arrêté… Sans même parler de prélèvements indus, d’estimations surévaluées, de taxes d’assainissement dans des hameaux non-raccordés au réseau de tout-à-l’égout, etc…
Bien sûr, le prix de l’eau dépend de l’éloignement du lieu de captage, du type de ressource (nappe phréatique ou eau fluviale) et du traitement nécessaire selon la qualité de l’eau brute, enfin de la densité de la population, de la nature de l’habitat (groupé ou dispersé).
Il varie aussi selon les régions et les communes. Les zones touristiques sont obligées d’avoir des réseaux surdimensionnés par rapport à la population permanente pour faire face aux pics saisonniers de fréquentation. Parfois, l’eau est plus chère en haute-saison.
Certaines communes encouragent le gaspillage en facturant les consommations de manière dégressive : l’abonnement est cher, les premiers mètres-cubes le sont aussi ; et après, plus on consomme, moins le mètre-cube est cher ! De sorte que le foyer modeste paie autant que ceux qui ont vaste pelouse et belle piscine…
D’autres sont plus vertueuses : les premiers mètres-cubes correspondant aux besoins normaux sont relativement bon marché ; ensuite, ils sont plus chers, encourageant ainsi les clients à ne pas gaspiller cette ressource naturelle.
Pour information, la consommation annuelle moyenne d’une famille française de quatre personnes est de 120 m3.
Il est à craindre que le prix ne baisse pas car le réseau de canalisation est en mauvais état. En moyenne, un litre d’eau sur quatre s’enfuit des tuyaux et retourne à la Nature !
Les distributeurs d’eau ont engrangé de substantiels bénéfices ces dernières années, mais ont oublié de moderniser, quand ce n’est pas d’entretenir, le réseau. Par contre, ils ne manquent pas une occasion de proposer aux abonnés des assurances anti-fuites !
Quant aux taxes, redevances, etc… elles sont fixées à différents niveaux : la TVA est du ressort de l’Etat ; la redevance pour ‘’Prélèvement sur la Ressource en Eau’’ est fixée par l’Agence de l’Eau : moins élevée dans les zones où l’eau est abondante ; plus élevée dans les zones où la ressource est plus rare.
Le prix de l’eau n’est donc pas le même partout en France. En vue d’améliorer la transparence des prix, un observatoire a été créé sous la direction de l’office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) ; toutes les données sont publiées sur www.services.eaufrance.fr. Encore faut-il que les collectivités le renseignent… Or elles observent une prudente réserve : seuls 30 % des services d’eau potable (70 % de la population) et 25 % des services d’assainissement (59 % de la population) ont fait connaître leurs chiffres !
Dans l’habitat collectif, où vivent plus de 40 % des Français, le poste ‘’eau’’ consiste en une ligne sur un relevé annuel de charges ! La clarté n’est pas l’amie des gestionnaires… Pourtant avant l’assemblée générale des copropriétés, les factures peuvent être consultées et devraient être rendues publiques avec le détail de chaque élément : prix au mètre-cube, taxes, etc…
Heureusement, dans toutes les collectivités de plus de 10000 habitants, des commissions consultatives, obligatoires, voient siéger en leur sein des associations d’usagers.
Depuis janvier 2012, un décret rend obligatoire un examen approfondi du réseau entier de canalisation : lui seul permettra de connaître les tronçons à traiter prioritairement et d’évaluer le montant de ces travaux.
Dans le service de l’eau, potable ou usée, des efforts sont attendus pour les années à venir afin de parvenir à une bonne gestion, de la ressource et de l’abonné.
MT/06/2012