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Loi santé: point d’étape

Au-delà du bras de fer entre la ministre de la Santé et les médecins sur le tiers payant généralisé, le projet de loi Santé signe des avancées sur le terrain de la nutrition, mais manque d’ambition sur les déserts médicaux et la lutte contre l’obésité.
Votée par l’Assemblée nationale le 14 avril 2015, la loi Santé sera examinée par le Sénat dans le courant du mois de mai. Avant la reprise des débats, voici une analyse des changements adoptés, du moins provisoirement.

 Nutrition
– L’étiquetage nutritionnel simplifié sur les emballages, sur la base du volontariat des distributeurs et fabricants, est une revendication ancienne de l’UFC-Que Choisir. Si les sénateurs confirment ce principe, un décret et un suivi rapproché de son application seront nécessaires pour s’assurer de sa bonne mise en œuvre.

– La suppression des fontaines à soda en libre-service relève du bon sens.

– L’UFC-Que Choisir avait renouvelé sa demande d’encadrer la publicité en faveur des produits gras et sucrés aux heures de grande écoute pour préserver les enfants et les adolescents, sans succès. Un nouvel amendement dans ce sens sera soumis lors du débat au Sénat. De même, l’UFC renouvellera sa proposition de taxation différentielle en fonction de l’intérêt nutritionnel.

– La lutte contre la dénutrition chez les personnes âgées est inscrite dans la version provisoire de la loi. C’est un objectif louable, à concrétiser par des objectifs précis.

 Tabac
– L’arsenal de la lutte contre le tabagisme se complète d’une interdiction de fumer dans les voitures transportant des mineurs et de l’apparition des paquets neutres à partir de mai 2016.

– La vapote, bizarrement inscrite dans le même chapitre de la loi, est encadrée : elle serait interdite dans les établissements scolaires et tous les lieux accueillant des mineurs (crèches, bibliothèques, etc.), dans les transports collectifs et sur les lieux de travail fermés et à usage collectif. La règlementation s’annonce donc moins stricte que pour la cigarette classique, puisqu’en l’état, il serait admis de tirer sur sa cigarette électronique sur le quai d’une gare, ou dans un bureau à condition de l’occuper seul.

Pollution
– La pollution de l’air extérieur fait l’objet de nouvelles mesures. Des objectifs annuels de diminution des particules dans l’air seraient fixés. La population serait mieux informée sur les risques et la conduite à adopter lorsque les seuils sont dépassés.

– Des « valeurs guide » seraient instaurées pour l’air intérieur.

Amélioration de l’accès aux soins
– Le tiers payant chez les médecins de ville serait généralisé d’ici à novembre 2017.

– Un numéro national pour appeler le médecin de garde serait créé, mais il reviendrait à l’Agence régionale de santé de décider si, localement, il faut composer ce numéro ou bien le 15.

– Les familles seraient incitées à déclarer un médecin traitant pour leurs enfants, jusqu’alors dispensés.

– Les personnes bénéficiant de l’aide à la complémentaire santé (ACS) se verraient garantir un encadrement des tarifs pour les soins optiques et dentaires, comme c’est déjà le cas pour les bénéficiaires de la CMU.

– La problématique des déserts médicaux (y compris en milieu urbain) reste entière, puisque le projet de loi ne mentionne que la promotion de l’installation dans les territoires déficitaires et le rôle d’organisateur des Agences régionales de santé (ARS). L’UFC-Que Choisir estime que c’est insuffisant, et réitère sa demande de conventionnement sélectif des médecins, afin de limiter leur installation dans les zones où l’offre de soins est déjà pléthorique.

– L’automédication est laissée sur le bord de la route. La possibilité d’acheter des médicaments sans ordonnance dans les grandes surfaces, sous la supervision d’un pharmacien, n’est pas mentionnée.

Action de groupe en santé
C’est un pas en avant pour les victimes, mais le dispositif tel qu’il est décrit dans le texte actuel manque de précision. En particulier, les modalités et la prise en charge de l’expertise individuelle, point crucial, ne sont pas précisées. La médiation pose également problème. En outre, l’action de groupe ne modifiera en rien la loi qui s’applique aux médicaments, or cette loi, issue de la directive sur les produits défectueux, constitue actuellement une impasse pour les victimes.

Droit à l’oubli
Il est prévu de déterminer un délai au-delà duquel les personnes ayant souffert d’un cancer ne peuvent plus se voir appliquer de majoration de tarifs pour assurer un emprunt. Ces dispositions pourraient être étendues aux patients souffrant d’une maladie chronique, dans la mesure où les traitements ont progressé au point qu’ils ne doivent plus être considérés comme « à risque ».

Données de santé
– L’assurance maladie hérite du dossier médical personnel (DMP), sorte de document électronique rassemblant les résultats d’examen, comptes-rendus d’hospitalisation, diagnostics et bilans de chacun. Le DMP n’en finit pas de ne pas aboutir depuis plus de 10 ans.

– Un dispositif règlementerait l’accès aux bases de données de l’assurance maladie et des hôpitaux. Les autorisations d’accès seraient gérées par un Système national des données de santé (SNDS), l’objectif étant de favoriser les études de santé publique tout en bloquant les velléités commerciales des assureurs et des banquiers.

 Divers
– Perturbateurs endocriniens. La demande de l’UFC-Que Choisir d’identifier les composés ayant un effet perturbateur, afin de les encadrer, n’a pas été entendue. Mais un amendement interdisant le bisphénol A dans l’ensemble des objets destinés aux enfants a été adopté.

– Déprescription chez les personnes âgées. L’UFC souhaite que la Haute Autorité de santé évalue la consommation de médicaments chez les personnes âgées et formule des recommandations pour la faire baisser. L’idée d’inscrire la déprescription dans les objectifs conditionnant le complément annuel de rémunération des médecins n’a pas été retenue.
Anne-Sophie Stamane – wwwque choisir.org

04/2015

 

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